SEKU MÂGA - Christiane TAUBIRA, LETTRE OUVERTE

Publié le par SEKU MÂGA


L’ANTIKAMITISME EST UN CRIME CONTRE

 L’HUMANITE

A QUAND SA RECONNAISANCE ?




Extrait de la


Lettre ouverte du Mâsa Seku Mâga


à

 

Christiane TAUBIRA
 

Face à la montée grandissante de la discrimination contre les Noirs, et devant la désorganisation de la communauté noire victime de racisme en France et ailleurs, la Diaspora et les Africains du continent doivent, à l’exemple des juifs, organiser leur défense et imposer le respect de leur « race » et de leurs ressortissants. Les électeurs de la communauté noire et leurs amis doivent montrer leur force et peser sur l’échiquier politique en exigeant que, partout, les candidats aux élections dont les présidentielles et les législatives s’engagent à faire reconnaître l’antikamisme, l’esclavage et la traite négrière crime contre l’humanité.

 
Chère Sœur,

Ayant constitué la Caravane de Retour et quitté la Martinique, ma terre de naissance, pour rejoindre avec ma famille la terre ancestrale, le continent africain, nous sommes des réfugiés au Sénégal, sans toutefois bénéficier des droits liés au statut de refugié-victimes du crime contre l’humanité qu’est la traite négrière.

Le Sénégal n’a encore pris aucune disposition officielle pour venir en aide aux candidats au Retour réclamant Réparation,  puisqu’il n’a pas reconnu à l’exemple de la France, dans sa législation la traite négrière transatlantique crime contre l’humanité. De plus, il est de notoriété publique, que le président actuel du Sénégal, Monsieur Abdoulaye Wade, s’est officiellement affiché jusqu’ici comme un véritable opposant à la réparation, telle que la Diaspora victime la réclame.

Aussi, depuis le 16 août 2003, ma familles et moi, sommes sur notre terre ancestrale, des apatrides et des sans papier, car :

1°)  Nous refusons en tant que ressortissants de peuples autochtones victimes de crime contre l’humanité, de garder l’identité française, qui est pour nous celle de la  nation criminelle et  donc coupable.
 

2°) Nous ne pouvons non plus cautionner les frontières artificielles héritées de la conférence coloniale de Berlin de 1885, et réclamer nos droits et souveraineté autochtones, en adoptant une nationalité quelconque d’un état actuel de l’Union Africaine, qui résulte du découpage colonial.

C’est avec une grande admiration que je m’adresse encore une fois à vous, étant profondément reconnaissant pour l’œuvre monumentale que vous avez effectuée en obtenant l’adoption d’une loi française qui reconnaît la traite négrière transatlantique et l’esclavage crime contre l’humanité.

Comme j’ai eu l’occasion déjà de vous l’exprimer de vive voix, cette loi fonde un précédent historique, car elle introduit une nouvelle donne dans la géopolitique internationale, notamment à cause de la place stratégique que l’Afrique et la Diaspora occupent et du rôle qu’elles sont appelées à jouer sur l’échiquier de la politique mondiale.
 
La conférence mondiale contre le racisme, organisée par l’ONU à Durban en Afrique du sud en août-septembre 2001, a bénéficié de l’effet de la loi française qui porte votre nom, et un des arguments forts de Durban a été l’exemple qui provenait de la France, qui quatre mois auparavant, avait adopté une telle loi.

Je pense sincèrement que votre parcours et vos origines vous conduisent à jouer un rôle stratégique dans l’avenir, pour la reconnaissance du droit souverain des peuples autochtones victimes des agressions coloniales diverses, des traites négrières, de l’esclavage, de la déportation et de génocide.
Car ce sont les peuples autochtones et leur souveraineté de droit divin qui ont été agressés par la civilisation dite du livre, et aujourd’hui particulièrement, depuis la déclaration universelle des Droits de l’Homme, par le programme de l’intégration du monde dans la pseudo démocratie occidentale.

Toute la logique de la mondialisation, et la sacro sainte démocratie occidentale qui constitue la base de la bonne gouvernance que l’on nous impose, reposent essentiellement sur l’écrasement des autres civilisations et particulièrement celles de nos peuples autochtones.

J’ai noté que le président du Sénégal, Monsieur Abdoulaye Wade a annulé la célébration à Gorée du 23 août 2004, où il devait lui-même vous remettre le Prix de la Renaissance Africaine, que la communauté noire vous décernait sous la direction du Professeur Pierrette  Herzberger Fofana, imminente intellectuelle du continent, à l’occasion de la Journée internationale décrétée par l’ONU pour commémorer l’abolition de l’esclavage en souvenir de la révolte haïtienne du 23 août 1791.
Cet évènement prévu en cette année 2004, décrétée par L’ONU « année internationale », pour célébrer le bicentenaire de l’indépendance de Haïti, mettait l’accent sur votre action victorieuse de femme de la Diaspora, contribuant à nommer le crime pour lequel nous pouvons aujourd’hui, grâce à votre loi, demander Réparation.

Ce prix de la Renaissance Africaine qui vous était dédié était d’autant plus significatif, qu’il découlait du choix que la communauté, qui vous avait élue devant les chantres du panafricanisme que sont  Thabo Mbeki, président d’Afrique du Sud et Abdoulaye Wade lui même, Président du Sénégal.

Mais comment expliquer qu’en ce 23 Août 2004, rien de significatif ne se soit passé à Gorée ?
Pourquoi et par la volonté de qui, Gorée a-t-il été  écarté  ce jour là de sa véritable  vocation de patrimoine de l’Humanité, de sanctuaire, pour la mémoire de l’infamie de ces crimes odieux que sont la traite négrière, l’esclavage et l’antikamitisme, cette idéologie raciste qui les ont alimentés ?

Ce qui est certain, c’est que partout où il y aura hostilité pour la Réparation que réclame la Diaspora Victime, il y aura aussi hostilité contre le symbole que vous incarnez désormais.

Je note également avec étonnement, le fait que vous ne puissiez vous représenter à la candidature de la magistrature suprême de la France, à l’occasion des prochaines élections de 2007. Cela montre que la classe politique de ce pays, n’est pas encore prête à vous laisser passer du moins facilement, car personne n’a oublié votre prestation lors des élections présidentielles françaises de 2002, où vous avez surpris l’opinion par votre avancée et  le soutien massif de la communauté noire, qui vous a largement suivie et plébiscitée.
 
Convaincu de votre ténacité, je me joins à ceux qui vous encouragent à poursuivre votre œuvre militante, et vous invite à soutenir  la Caravane du Retour et de la Limkam, la ligue mondiale contre l’antikamitisme, dans la lutte contre  le racisme spécifique contre les personnes de « race » noire, ayant dans leur sang une prétendue malédiction de Kam (Cham).

Connaissant votre attachement à la Guyane et votre implication pour la dignité de toutes les communautés qui vivent dans les Amériques, je vous rappelle que le combat que je mène  compte aussi pour  la défense des droits des peuples amérindiens  autochtones.

Etant entendu que la lutte contre l’antikamitisme implique aussi la défense des communautés  nègres aux Amériques et dont la présence millénaire sur le continent  amérindien, précède  de loin l’arrivée de Christophe Colomb, comme en témoignent les travaux de nombreux chercheurs, parmi lesquels Jean Mazel, Ivan Van Sertima  et le sénégalais Pathé Diagne.

La Lutte contre l’antikamitisme nécessite un retour sur  le débat introduit par l’Evêque catholique espagnol Las Casas au début du 16ème siècle, où la question de la  prétendue origine  sémite des Amérindiens à été évoquée, pour justifier la déportation et l’esclavage vers les Amériques des Africains, dits Kamites, qui eux n’auraient pas d’âme.

Le mot Antikamitisme (que j’ai  inventé et que j’utilise depuis de nombreuses années), a pour objectif de contribuer à la constitution d’une sémantique indispensable à notre communauté, pour asseoir dans notre propre imaginaire, et dans celui de nos interlocuteurs, les particularités de nos identités, et poser les fondements de notre défense, en établissant les mécanismes de la reconquête de notre souveraineté et nos libertés.

C’est ainsi que le mot antikamitisme s’ajoute au mot diaspora, que j’ai aussi introduit de manière intensive dans notre langage, depuis la création des radios libres en France avec Diaspora 2000, dont j’ai été un des fondateurs, dans les débuts des années 80.
 
Dès cette époque charnière, qui a marqué un véritable tournant dans l’organisation communautaire en France, j’ai volontairement introduit l’utilisation des expressions telles que « communauté noire », « communauté noire internationale », « africains martiniquais »  ou  "africains caribéens » pour ne citer que ces termes qui, aujourd’hui, ne choquent plus, alors qu’à l’époque ils alimentaient les débats houleux de notre radio Tropic fm.
Car tous ces expressions battaient en brèche les mots aliénants du colonisateurs tels que, DOM TOM, l’outre-mer, créole, métropolitains, etc.
 
Ainsi, tout comme les juifs européens ont su inventer une sémantique qui leur est propre, et introduire leurs terminologies dans le langage de tous, comme c’est le cas du mot   « antisémitisme » imaginé par Wilhelm Marr qui l’utilisa en 1879 et le mot « sémite » inventé un siècle auparavant par le linguiste allemand  auguste Ludwing Schlözer,
il est donc légitime que notre communauté noire mondiale victime, puisse évoquer les origines historiques de la prétendue malédiction de Kam ( Cham) pour qualifier d’antikamitisme, le racisme anti-nègre dont elle est globalement  la victime...

Pour enrayer ce racisme anti-noir, source de malheur de l’Afrique et de toute la communauté noire internationale, je vous invite à rejoindre les objectifs de la Caravane du Retour et de la Limkam, à travers l’opération « ANTIKAMITISME CAP 2010 »

Cette initiative s’inscrit dans les enjeux de la Diaspora, pour la décennie 2001-2010, qui commence avec votre Loi en France, et la Conférence de Durban  de l’ONU,  où a été   reconnue la traite négrière, crime contre l’humanité.

Il convient que cette décennie se termine dans la droite file de votre logique, en bénéficiant de l’impact international de la coupe du monde de football, qui se tiendra en 2010 en Afrique du sud, pays de l’apartheid et haut lieu de l’antikamitisme dans le monde, pour faire connaître l’avancée de notre lutte.

ANTIKAMITISME CAP 2010,  nourrit l’ambition de voir à l’échéance 2010, les états de l’Union Africaine reconnaître dans leur législation la traite négrière, l’esclavage et l’antikamitisme, crime contre l’humanité.

Les deux pays pilotes que notre communauté doit amener à reconnaître ce crime contre l’humanité afin qu’ils y entrainent les autres sont les deux chantres de l’organisation internationale de la francophonie, la France et le Sénégal.

L’année 2007  marque les 400 ans de la colonisation des Etat Unis et des Français dans les Amérique, aux USA et au Canada. Il convient que la communauté noire en France, aux Antilles- Guyane et Réunion,  au Sénégal et ailleurs,  se mobilise à l’occasion de la campagne pour les présidentielle de 2007 en France et au Sénégal (qui abrite Gorée), pour amener l’opinion à exiger des candidats susceptibles de remporter les élections, qu’ils inscrivent dans leur programme, de faire voter en priorité une  loi dans leur pays en faveur de la Diaspora, reconnaissant l’antikamitisme, l’esclavage et la traite négrière crime contre l’humanité.
 
Honorés et pleinement satisfaits que vos soucis rejoignent les nôtres(...)

Recevez, Chère Sœur, nos meilleures salutations.

DOCUMENT D'ARCHIVE
Novembre 2006
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